Comment choisir ses lunettes polarisantes en quatre étapes

Quel pêcheur n’a jamais testé ou entendu parler de lunettes polarisantes, ces lunettes « magiques » qui permettent de voir les poissons ? Personne, et pourtant, je croise assez peu de pêcheurs qui en soient équipés, alors que pour ma part, je serai incapable de m’en passer aujourd’hui, même si je n’ai jamais supporté les lunettes de soleil classiques. C’est que bien souvent les déçus ont surtout essayé des modèles mal adaptés et probablement de piètre qualité. D’où ces quelques conseils pour faire votre choix sans prendre de risque.

Les lunettes polarisantes, comment ça marche ?

 Si en France le principe des lunettes polarisantes s’est popularisé depuis une dizaine d’années, il est en réalité bien plus ancien qu’il n’y paraît. Les Eskimos et les Inuits utilisaient en effet des masques faits en os, en ivoire ou en bois, dans lesquels une fine ouverture horizontale était pratiquée. Placé au plus près de l’œil, le masque permettait de conserver un champ de vision large tout en captant et en réfléchissant les rayons du soleil qui se réverbèrent sur la glace.

Alors que les lunettes solaires classiques se présentent comme de simples verres teintés, qui vont assombrir et diminuer la luminosité, les lunettes polarisantes fonctionnent sur le même principe que les masques eskimo. Il s’agit d’une lentille, teintée ou non (les filtres polarisants pour les appareils photo sont parfaitement transparents), sur laquelle est posé un filtre qui va capter les rayonnements les plus nocifs et violents du soleil. Ces rayonnements, situés entre 550 et 580 nanomètres (nm) sur le spectre de la lumière, correspondent à la lumière jaune, celle qui se trouve également reflétée par le verre ou la surface de l’eau.

Schéma spectre de la lumière. Sur ce schéma, on peut observer que la polarisation élimine et bloque principalement les rayonnements jaunes, situés aux alentours de 550 et 580 nm, et les rayonnements violets, à 400 nm.

 

L’intérêt des lunettes polarisantes est donc multiple :

  • Santé :  généralement anti-UV (comme la plupart des lunettes solaires du marché), les lunettes polarisantes offrent en éliminant les rayonnements les plus  dangereux une excellente protection pour les yeux. En effet, quand on      passe plusieurs heures par jour par semaine sur l’eau, l’exposition au  soleil sans protection oculaire peut entraîner à court terme des troubles  ophtalmiques (et notamment des migraines), mais aussi à plus long terme la cataracte,la DMLA précoce et des photo-kérato-conjonctivites, le tout pouvant mener à la  cécité. Costa del Mar dispose d’ailleurs une technologie permettant  d’éliminer les rayonnements de 580 nm (d’où le nom des verres haut de      gamme, 580G et 580P) qui sont les plus nocifs.
  •  Confort :  comme les lunettes polarisantes diminuent peu la luminosité ambiante, mais au contraire renforcent les contrastes en éliminant les rayonnements violets, il est possible de les conserver longtemps, même lorsque la      luminosité diminue, par temps couvert par exemple.
  •  Performance :  l’élimination des rayonnements obliques de lumière jaune, c’est-à-dire les reflets, permet de distinguer plus facilement les obstacles dans l’eau, d’identifier les différents types de fond, d’herbiers, les poissons     postés, les poissons qui suivent, etc. Bref, indispensable pour les pêches à vue, mais aussi pour repérer le fourrage, éviter d’abîmer son hélice sur  une belle caillasse isolée…

 

Étape 1 : le prix, la marque.

La première étape consiste à définir le budget et le choix de la marque. Il en existe à tous les prix, de 10 à 300 €. D’ailleurs, si vous avez des lunettes de soleil qui traînent chez vous, vous pouvez les tester, il s’agit peut-être d’une paire de polarisantes. Il vous suffit de regarder l’écran d’une montre digitale à travers le verre. Selon l’orientation du verre, l’écran de la montre deviendra noir dans le cas d’une paire de lunettes polarisantes.

 

Deux critères sont importants pour guider ce premier choix (opinion personnelle) :

  • Il faut mettre un minimum de 50 € pour s’assurer de  la qualité, de la performance et de l’ergonomie des lunettes. Si vous  prenez des lunettes de mauvaise qualité, vous ne les porterez pas, la différence ne sera pas suffisamment flagrante en termes de performances.  De manière générale, vérifiez bien que les lunettes que vous choisissez  sont aux normes CE (petit logo à l’intérieur des branches). De même,  méfiez-vous des contrefaçons (notamment quand les prix sont vraiment trop      différents du reste du marché), les lunettes de soleil haut de gamme sont      souvent copiées. Il ne faut pas transiger avec la qualité, il s’agit la      santé de vos yeux avant tout !

 

  • Privilégiez les marques d’opticiens. De nombreuses marques de matériel de pêche proposent des lunettes polarisantes dans votre catalogue. Cependant, il n’y a aucune indication sur la provenance  de ces verres, sur leur fabricant, et donc sur la qualité de la  polarisation. Bien souvent il s’agit de la même usine chinoise travaillant  pour des dizaines de marques différentes. Avec des fabricants purs et durs de lunettes, vous vous assurez d’un minimum de qualité et traçabilité. En bas de gamme, la marque Polaroid convient bien. En moyen de gamme, Julbo et Bollé font très bien le job. Pour le haut de gamme, le choix est plutôt varié, avec Vuarnet, Oakley, Maui Jim ou encore Costa del Mar. La    différence entre une monture à 50 € et une à 250 € ? La clarté du verre, sa qualité, la performance de la polarisation et l’ergonomie de la  monture !

 

Étape 2 : le choix de la monture

 Le choix de la monture est l’étape suivante. Là encore, si les lunettes sont trop lourdes et inconfortables, vous ne les porterez pas. Plusieurs critères sont à prendre en compte :

  • La forme : il y a deux formes principales,  masque ou lunettes. Alors que les lunettes reposent sur l’arête du nez, le      masque va plutôt reposer sur les pommettes. De fait, ce dernier est beaucoup plus couvrant, il offre une meilleure vision et le poids de  l’ensemble est mieux réparti. En revanche, les montures ont souvent un look  très sport, moins esthétique (mais ça dépend vraiment des goûts). Pour ma  part je préfère vraiment les masques pour la pêche (et je me moque (un  peu) de l’esthétique). En ce qui concerne la matière des branches, je n’ai pas vraiment de conseil à ce niveau, le nylon est souvent plus léger et  relativement solide.

 

Crédit photo Costa Del Mar

  • La taille et l’ergonomie : attention, tous les  modèles n’existent pas dans toutes les tailles. Veillez bien à ce que le      modèle qui vous plaît soit dans la bonne taille, c’est fondamental pour l’ergonomie. De même, lorsque vous testez vos lunettes, vérifiez qu’elles ne glissent pas de votre nez, qu’elles tiennent bien si vous secouez la tête, qu’elles tiennent bien lorsque vous les portez sur le crâne, qu’il y ait des pads antidérapants de bonne qualité, etc.
  •  L’esthétique : ça, c’est votre problème !

 

Étape 3 : verre ou plastique ?

 Il existe deux types de verres : en plastique (polycarbonate) ou en verre. Chacune de ces matières dispose de ses avantages et de ses inconvénients, et il s’agit principalement d’une question de budget. Pour ma part, je préfère le verre parce que j’apprécie la durabilité du produit et la facilité d’entretien. En revanche, j’ai appris à utiliser constamment un cordon. Je trouve en revanche qu’avec une utilisation normale, les verres en polycarbonate se rayent quand même plus rapidement, obligeant à les changer au bout de quelque temps.

 

MATIERE

AVANTAGE

INCONVÉNIENT

VERRE
  • ne        raye pas,
  • meilleure        vision.
  • peut        casser en cas de chute,
  • un        peu plus lourd que le polycarbonate,
  • un        peu plus cher que le polycarbonate.
POLYCARBONATE
  • ne        casse pas,
  • plus        léger que le verre,
  • moins        cher que le polycarbonate.
  • raye        facilement,
  • la        vision est moins bonne (surtout quant les lentilles commencent à se rayer).

 

Étape 4 : quelle teinte de verre pour quel usage ?

 Les lunettes sont un peu comme un set de combos canna/moulinet : il faudrait plusieurs teintes de verres pour s’adapter à toutes les conditions de luminosité. Cependant, s’il fallait n’en choisir qu’une, ce serait la teinte Gris ou Copper (cuivre/marron), voir le top, une base Copper avec un filtre miroir comme le Silver Mirror de chez Costa del Mar. Pour les couleurs, voir le tableau ci-dessous :

 

TEINTES

CONDITIONS

Gris/Gray (Silver   Mirror)

Polyvalent

Vert/Green (Green   Mirror)

Temps très lumineux   (eau douce)

Bleu/Blue (Blue   Mirror)

Temps très lumineux   (mer/exotique)

Cuivre/marron/Copper

Polyvalent

Ambre/Amber

Temps couvert

Rose/Pink – Jaune/Yellow

Faible luminosité   (uniquement aube ou crépuscule)

 Attention, les verres roses ou jaunes sont conçus pour des conditions très spécifiques, car ils protègent très mal des rayonnements nocifs du soleil. Il faut donc les réserver pour l’aube et le crépuscule, quand la luminosité est très faible. Pour la petite histoire, Costa del Mar a longtemps refusé de faire des verres jaunes pour des raisons sanitaires (la société a été fondée par des opticiens passionnés de pêche sportive). Elle n’a cédé que récemment sous la pression des demandes de pêcheurs. En revanche, je ne connais pas l’utilité des verres orange qu’on peut trouver chez d’autres marques.

 

L’entretien des lunettes polarisantes

 Quand on met un prix conséquent dans ses lunettes, il est primordial de les entretenir correctement. Dans un premier temps, si vous avez opté pour des verres en polycarbonate, vous devez prendre un maximum de précautions : toujours les entreposer dans leur boîte sans rien d’autre, ne jamais les essuyer à sec, toujours utiliser une serviette microporeuse ou des lingettes spéciales (les essuyants/absorbants ne sont pas conseillés), en veillant à utiliser du liquide pour lunettes ou vitres. Ou encore du produit vaisselle. Le verre est nettement moins contraignant, car il ne raye pas, mais l’usage d’un cordon est obligatoire pour éviter qu’elles ne tombent au sol et se brisent.

 

Lorsque je discute de lunettes polarisantes avec des pêcheurs passionnés, j’entends souvent les mêmes remarques : « je n’aime pas les lunettes de soleil », « j’ai trop peur de les faire tomber » ou « je les perds toujours ». Je dois reconnaître que je ne comprends pas vraiment ce type de remarques, tant les lunettes polarisantes sont devenues indispensables à mes yeux (ah ah), au même titre qu’une canne. Quand certains sont capables de mettre plus de 600 € dans des cannes, qui pourtant peuvent se briser tout aussi facilement, comment refuser l’investissement dans une paire de polarisantes de qualité ? Alors, je vous le promets, essayer des lunettes polarisantes, c’est les adopter.

Moniteur et entraîneur de voile pendant sept saisons, je porte des lunettes polarisantes depuis l’âge de 18 ans. Aujourd’hui, je fais partie du pro-team de Florida Fields [www.floridafishing.fr], le distributeur français de la marque américaine Costa del Mar. J’ai été d’ailleurs formé par ces derniers pour les représenter sur leur stand lors de l’EFFTEX 2012 à Paris

 

 

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