Pétition pour une fermeture commune brochet/sandre en Saône et Loire pour tous les pêcheurs

Depuis de nombreuses années et à chaque Assemblée Générale de la Fédération de Pêche de Saône et Loire, c’est la même demande qui revient chez les pêcheurs à la ligne: Peut -on avoir une fermeture brochet-sandre commune? et cela depuis plus de 20 ans.

Un peu d’histoire:

N’allez pas croire que les dates de fermeture et d’ouverture ont toujours été les mêmes à travers le temps. Elles ont été fonction des époques et de la considération du moment envers les différentes espèces peuplant nos eaux.

C’est surtout à partir du 15ème siècle et pendant tout l’Ancien Régime qu’une première juridiction sur les eaux courantes a vu le jour. En 1515, François 1er rédige une ordonnance royale portant règlement général des chasses qui, traitant également de la pêche, instaure les premières périodes d’interdiction “de pêcher de nuit de mi mars à mi may car les poissons frayent et les pêcheurs de nuit les chassent et détruisent leur fraye“.

En 1669, c’est une ordonnance de Colbert qui rassemble les réglementations disparates établies depuis le Moyen-Age. Puis, après les boulversements de la Révolution, la première loi sur la pêche fluviale verra le jour en 1829 et déterminera par ordonnance royale les temps, saisons et heures pendant lesquels la pêche sera interdite. A partir de 1868, une fermeture des espèces (autres que salmonidés) est fixée du 15 avril au 15 juin. Je ferai un grand bond en avant dans le temps pour constater que des fermetures par espèces verront le jour beaucoup plus tard.

Il a fallu me plonger dans les archives de mon AAPPMA pour essayer de comprendre le cheminement des dates d’ouvertures de ces 2 espèces qui suscistent tant de convoitises des uns et des autres.

Un sujet polémique et complexe qui voit le jour dans les années 90.

Et c’est à en perdre son latin lorsque l’on essaye de suivre la question des dates d’ouverture/fermeture. Autant vous dire qu’aujourd’hui, c’est bien plus simple que par le passé… n’en déplaise à certains.

Apparu dans les années 70, le sandre n’a pas connu de fermeture spécifique au moment de son apparition. En 1986, en raison de la bucéphalose larvaire véhiculée par le sandre, la période de fermeture du brochet et par la même du carnassier qui s’étendait du 2 février à l’ouverture générale de la pêche a été suspendue  afin “de permettre le maximum de captures de sandres vecteurs de l’épizootie“. Ce qui montre de fait, une fermeture du sandre en même temps que le brochet et cela en raison de restrictions techniques imposées par le code rural.  La pêche du brochet s’arrête et par obligations réglementaires, celle du sandre aussi, mais pas pour tous les pêcheurs.

Plusieurs années après l’explosion démographique du sandre, les populations se sont stabilisées et l’on s’est vite interrogé sur la nécessité de le protéger spécifiquement avec l’instauration d’une période de fermeture pendant sa période de reproduction et la mise en place d’une taille minimale de capture.

C’est en 1994 que le premier arrêté préfectoral instaure, dans notre département, une fermeture spécifique disctincte brochet et sandre.

Pourtant la Fédération de Pêche de Saône et Loire s’était prononcée pour une fermeture commune des 2 espèces dès 1992. En effet,  l’Assemblée Générale de la Fédé adopte en 1992 plusieurs dispositions réglementaires pour la période 1993/1997, à savoir:

-une fermeture spécifique du brochet du 1er février au  15 mai (64 votants 52 voix pour)

-une fermeture du sandre la même que le brochet (58 voix pour et 6 contre)

– une taille réglementaire de capture du sandre à 40cm (48 voix pour); laquelle sera effective dès l’arrêté préfectoral réglementant la pêche de 1993.

Malheureusement ces propositions ne seront pas toutes acceptées et retoquées par la Préfecture.

L’année 1993 verra même aucune fermeture pour le sandre et la mise en place de négociations entre pêcheurs aux engins (professionnels et amateurs) et pêcheurs à la ligne. Les premiers voulant, comme aujourd’hui, pouvoir pêcher le plus possible, comme l’écrivait le représentant des pêcheurs pros à l’époque: “nous vous rappelons qu’un pêcheur professionnel, surtout à temps plein, ne peut rester trop longtemps sans rentrée d’argent et que nous refuserons avec force toute mesure réglementaire qui aurait pour conséquence de nous priver trop longtemps et quasi totalement de notre revenu”.

Ce même représentant reconnaît aussi: “nous sommes d’accord pour considérer que la pêche au filet pendant la période intense de déplacements des brochets est inopportune même si les brochets capturés sont ralâchés(…) Par contre, nous ne sommes pas sûrs, en l’état actuel de la Saône  que ce soit une bonne chose de protéger excessivement le sandre”.

C’est déjà le pot de terre contre le pot de fer : l’intérêt économique d’une minorité (8 pêcheurs professionnels à temps plein à l’époque) qui mise tout sur le sandre, contre l’intérêt du milieu et la préservation des espèces comme le brochet, le carnassier autochtone.

En 1994, l’arrêté préfectoral se traduit alors par une fermeture du brochet fin janvier et une fermeture du sandre fin février. C’est alors que les AAPPMA ont régulièrement sollicité, lors des questions des AAPPMA aux AG Fédérales, une fermeture brochet/sandre commune.

Pour 2004, à la réponse à le demande d’harmonisation d’une fermeture brochet/sandre avec ouverture du 1er janv au 25 janv puis du 8 mai au 31 déc, la DDAF rejette la demande, mettant en avant “le poids économique de quelques pêcheurs professionnels“. Mais la fédé ne perd pas espoir et renouvelle sa demande pour 2005.

En 2006, M. DUBRIONT, mentionne que “depuis 10 ans, nous avions mis en place une réglementation. Les demandes des pêcheurs professionnelles ont été prises en compte par le MEDD.”(ministère de l’Ecologie et du Dévloppement Durable) et elles se traduisent en 2007 avec un arrêté préfectoral qui apporte des modifications à la fermeture du sandre. Celle-ci est repoussée de 2 semaines vers le 10 ou  11 mars suivant les années.

C’est donc le gros lot pour les pêcheurs professionnels qui ont près d’un mois et demi, de février à mars, pour disposer à leur guise des rivières et y laisser leurs filets. Quant au brochet, il n’est que le dernier de leurs soucis et seul le sandre a réellement pour eux une valeur économique. C’est d’ailleurs une période très productive pour eux. Au sortir de l’hiver les sandres se déplacent beaucoup.

Près de 20 ans après, quel est le bilan d’une telle réglementation?

On peut  s’interroger sur la raréfaction du brochet depuis les années 90. On s’accorde à dire qu’il est devenu de plus en plus difficile pour lui de trouver des conditions favorables à sa reproduction. L’aménagement et le recalibrage des cours d’eau, la modification des paysages ruraux avec la disparation du bocage, des zones humides… rendent celle-ci de plus en plus complexe et aléatoire.

En 1997 a été lancé un vaste programme d’amélioration et de réhabilitation des frayères à brochets afin d’enrayer sa raréfaction. Les projets sont menés, à l’exemple de la Saône en collaboration avec le Syndicat Mixte Saône et Doubs et les 7 fédérations de pêche concernées (21,70,25,39,01,69,71). Les frayères ont été recensées et des travaux effectués. Mais comment ses frayères peuvent-elles fonctionner si les brochets ne peuvent remonter?

Je prendrai en exemple la frayère du bief Colas sur la Seille, gérée par le Goujon Cuiserotain. Réhabiltée en 2007, le rapport du technicien de la fédé en 2010 est catastrophique: les pêches électriques ne révèlent qu’une rare présence de brochetons (1 à 4 poissons). Sauf que, dès 2008, à l’entrée de cette même frayère, les filets d’un pêcheur professionnele sont en place. Les brochets doivent par conséquent être sacrément rusés pour slalomer entre les-dits filets. Le plus étonnant, c’est de constater que ce pêcheurs professionnel a diminué sa pression de pêche sur le secteur depuis 2010 jusqu’à laisser son lot. Pour l’instant la pression de pêche exercée par son successeur est encore mesurée. Et qu’a-t-on alors constaté ?  La présence régulière de brochetons en 2011, 2012 et 2013.

On ne peut alors y voir qu’un lien de cause à effet :  moindre présence de filets en février mars = plus grande présence de brochetons dans la frayère. Lors de la rédaction du cahier des charges pour la location du droit de pêche pour la période 2012/2016, le Goujon Cuiserotain a donc formulé la demande d’une mise en réserve temporaire de fin janvier à l’ouverture en mai sur les 200m amont et aval de l’entrée de la frayère. Mais une fois encore, cette demande a été refusée par les pêcheurs professionnels car ce secteur représente pour eux un bon potentiel à sandres!!

Donc tout est dit, le brochet se raréfie, on investit pour réhabiliter les frayères mais on n’ a jamais osé dire que la présence des filets en février et mars était un facteur aggravant, compliquant le chemin déjà semé d’embuches de maître ésox pour qu’il assure sa descendance et ce, d’autant plus que depuis 1994 de nouveaux lots de pêche ont été ouverts à la pêche professionnelle. Du moins, l’administration ferme les yeux sur ce point et donne ainsi la part belle à la pêche profesionnelle.

Ceux-ci affirment alors qu’ils remettront les brochets capturés à l’eau. Sans doute! Mais quelle sont alors les chances de survie de ces poissons après une nuit, voir plus, passée dans un filet. Tous les professionnels (pisciculteurs, techniciens…) que j’ai cotoyés m’ont dit la même chose : un brochet manipulé en période de fraie est un poisson mort!

Cette demande de fermeture conjointe, la Fédération de pêche de Saône et Loire l’a faite récemment en vue de la rédaction de l’arrêté préfectorale définissant les dates d’ouverture et fermeture pour 2014. Malheureusement, une fois encore, la DDT n’a pas jugé bon de suivre les demandes des pêcheurs de loisir.

Je vous livre, en intégralité le texte rédigé par la Fédération de Pêche de Saône et Loire. Vous pouvez également le retrouver sur le site de la Fédé.

 

Préambule

Dans le département de Saône-et-Loire, la fermeture de la pêche du brochet ne coïncide pas avec la fermeture de la pêche du sandre comme cela peut-être le cas dans de nombreux autres départements Français.

Depuis les dernières négociations de 2006, la pêche du brochet ferme  fin janvier alors que celle du sandre ferme mi-mars, suite à des décisions de la Direction Départementale des Territoires de Saône-et-Loire en réponse à une demande des pêcheurs professionnels.

Effectivement, les mois d’hiver semblent être la période la plus favorable pour la capture des sandres aux filets. A cette saison, ces poissons sont très mobiles et donc très vulnérables.

Selon le principe d’équité entre pêcheurs amateurs et professionnels, l’administration a ouvert la pêche au sandre jusqu’au deuxième week-end du mois de mars pour les pêcheurs professionnels mais aussi pour les pêcheurs amateurs aux lignes. Certes cette mesure semble conférer plus de droit aux pêcheurs aux lignes, mais elle a aussi une incidence forte. En effet cette mesure a surtout justifié la présence de filets dans les cours d’eau à une période clé : celle où les sandres sont très mobiles donc plus faciles à capturer (aux filets), mais aussi et surtout celle de la migration et de la reproduction du brochet, espèce à ce jour encore protégée.

A cette époque, la Fédération avait déjà fait part de son désaccord et avait essayé tant bien que mal de s’opposer à cette mesure ; mais en vain, la pêche professionnelle ayant eu le dernier mot.

Sandre de la rivière Seille

Une mesure aux conséquences multiples

Cette mesure particulière présente de nombreuses conséquences dont les deux principales peuvent être résumées de la sorte :  

D’une part la règlementation pêche en vigueur ne donne pas les mêmes droits aux pêcheurs aux lignes et aux pêcheurs professionnels.

En effet l’article R 436-33 du code de l’environnement restreint considérablement les modes de pêche aux lignes en période de fermeture du brochet (à partir de la fin janvier) :

« Pendant la période d’interdiction spécifique de la pêche du brochet,  la pêche au vif, au poisson mort ou artificiel et aux leurres susceptibles de capturer ce poisson de manière non accidentelle est interdite dans les eaux classées en 2ème catégorie ».

D’autre part, le fait d’autoriser la pêche professionnelle aux filets jusqu’à la mi-mars permet la capture de brochets dans les filets.

Certes, seuls les sandres peuvent être conservés et les brochets doivent être remis à l’eau. Mais on peut s’interroger sur le devenir des brochets piégés dans les mailles d’un filet en cette période de grande fragilité. Nous estimons que cette pratique peut porter atteinte au recrutement de l’espèce alors que cette dernière est menacée (inscrite sur la liste rouge des espèces menacées en France) et normalement protégée pendant sa période de reproduction.

Ce dernier point nous interroge tout particulièrement et nous parait non acceptable au regard des diverses politiques entreprises pour protéger le brochet et ses habitats et des fonds alloués par ailleurs pour préserver cette espèce (voir la liste des aménagements entrepris par notre fédération pour cette espèce).

Petit brochetAlevin de brochet du bief Colas à Jouvençon (71)

Une demande de fermeture commune

Dans ce contexte très particulier, la Fédération a de nouveau sollicité la Direction Départementale des Territoires de Saône-et-Loire pour demander une fermeture commune (fin janvier) de la pêche au brochet et au sandre dès l’année 2014, pour les pêcheurs aux lignes et les pêcheurs professionnels.

Cette demande a aussi été formulée par les Fédérations voisines de l’Ain et du Rhône, pour lesquelles la double fermeture est encore en application.

Refus de l’administration lors de la commission de bassin pour la pêche professionnelle

Malheureusement pour nos structures associatives de la pêche de loisir, en charge de la protection des milieux aquatique, ces demandes sont instruites (dans nos régions) en  DREAL (Direction Régionale de l’Environnement de l’Aménagement et du Logement) par une commission appelée Commission de bassin pour la Pêche Professionnelle.

Au regard de l’intitulé et de la composition de cette commission, on comprend aisément pourquoi nos demandes ont bien du mal à se faire entendre.

Composition de la commission : 5 représentants des pêcheurs professionnels, 1 représentant des pêcheurs amateurs aux engins et filets, 1 représentant des pêcheurs amateurs aux lignes et des représentants des administrations DREAL (Direction Régionale de l’Environnement de l’Aménagement et du Logement), DDT (Direction Départementale des Territoires), ONEMA (Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques).

C’est donc sans surprise, lors de la commission de bassin pour la Pêche Professionnelle réunis le 6 novembre dernier, que nos propositions ont été rejetées sur avis et consignes de la DREAL Bourgogne et des Directions Départementales des Territoires concernées.

Appel à la mobilisation des pêcheurs de loisirs

Depuis la loi du 27 décembre 2012, chaque publication d’arrêté préfectoral réglementaire est soumise à consultation du public. Cette nouvelle procédure résulte de la mise en œuvre de l’article 7 de la charte de l’environnement qui consacre, en tant que principe à valeur constitutionnelle, le droit pour toute personne de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement.

Nous espérions et attendions que l’arrêté règlementaire permanent pour la pêche en Saône-et-Loire puisse être soumis à cette fameuse consultation. Mais il n’en sera rien ; l’arrêté réglementaire permanent n’ayant pas été modifié depuis 2013 (communication de la Direction Départementale des Territoires – plus d’informations à la page suivante).

Souhaitant, malgré tout, faire part de notre désaccord avec cette mesure, et ne pouvant malheureusement pas profiter de la consultation publique, il nous a fallu trouver un autre moyen d’expression.

Ce pourquoi, nous avons choisi de rédiger une pétition à l’intention du préfet de Saône-et-Loire.

Nous insistons néanmoins sur le fait que cette pétition n’a pas pour objet de remettre en cause l’activité de pêche professionnelle mais bien de protéger nos actions (restauration de frayère et zones humides) et nos espèces piscicoles. Nous souhaitons simplement que l’activité de pêche professionnelle cesse pendant la période de reproduction du brochet.

Mais nous souhaitons aussi que nos instances administratives ne s’appuient plus systématiquement sur des commissions représentant les pêcheurs professionnels alors que les mesures qui en découlent, impactent l’ensemble des pêcheurs qu’ils soient professionnels ou de loisir.

Si vous souhaitez,

  • une meilleure protection du brochet en période de reproduction,
  • une meilleure préservation du sandre en période de grande mobilité (capture au filet plus aisée),
  • que les souhaits de la pêche professionnelle ne soient pas prépondérants sur les demandes de préservation des ressources piscicoles des pêcheurs aux lignes,

alors nous vous invitons à venir signer la pétition suivante : http://www.mesopinions.com/petition/nature-environnement/demande-fermeture-commune-peche-sandre-brochet/11102

 

Une fermeture commune des 2 espèces, c’est protéger la reproduction du brochet et c’est aussi préserver les populations de sandres qui paient un lourd tribut en février et mars dans les filets.

La Fédération a envoyé un courrier explicatif à tous les présidents d’AAPPMA avec la pétition à signer. Il est temps que les pêcheurs à la ligne montrent ce dont ils sont capables. Faisons preuve de solidarité et d’unité pour défendre notre passion, pour défendre nos intérêts. Signons en masse cette pétition, une première de la part d’une Fédération qui mérite notre soutien.

Alors je ne peux que vous inviter à faire comme moi. Signer la pétition: soit par écrit, soit par internet. Attention, via le net, une fois que vous aurez envoyé votre signature, regardez votre boîte mail et envoyez un mail de confirmation sinon votre signature ne sera pas prise en compte.

Pêchement vôtre

Olivier BERNOLIN

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