1ère catégorie : Lâcher des truites de bassines ou pas ?

A voir les avis  qui fleurissent partout sur le net ou dans les conversations du bord de la rivière, commentaires très hostiles aux lâchers de truites par les AAPPMA, je tenais à réagir d’une part et à expliquer d’autre part.

Etant membre du bureau d’une petite AAPPMA gérant un parcours de première catégorie, je pense avoir assez d’expérience pour en parler sans langue de bois. Alors avant de vous envoler lyriquement dans la défense de la fario sauvage, faites l’effort de lire ceci.

La rivière que gère mon AAPPMA se nomme le Ternin, elle prends sa source en plein cœur du Morvan granitique ( Chamboux) pour rejoindre l’ Arroux (affluent de la Loire – 2ème catégorie sur la grande majorité de son parcours) à AUTUN (71). Auparavant le Ternin était fort réputé pour ses belles truites sauvages, truites qui existent encore en quantité mais il faut chercher les zones non urbanisées pour les trouver.

Des travaux de l’Onema et de la Fédé, relatifs à la température de l’eau ont mis en évidence que le Ternin à Lucenay L’Evêque (AAPPMA La gaule Lucenoise – département 71) subissait de forte hausses des températures lors des étiages estivaux. Quelquefois ces températures pouvaient  même être considérées comme mortelles pour les truites.

A cela plusieurs explications : Le barrage de Chamboux qui capte la source du Ternin et la réchauffe par la stagnation induite qu’un lac fait subir à un cours d’eau, la raréfaction du couvert végétal le long des berges, le réchauffement climatique (?), et tout un tas d’autres causes mineures mises bout à bout. Je citerai à titre personnel la pollution des fosse septiques des riverains, beaucoup plus nombreuses que les très rares effluents agricoles d’élevages bovins.

 

Conclusion : Le Ternin à Lucenay sur une partie de son parcours n’est plus vraiment totalement une rivière de première catégorie, sur deux biefs de moulins on y prend d’ailleurs de jolis brochets. néanmoins son côté sauvage, rapide ou calme attire de loin les amateurs de rivières qu’on ne trouve pas sur le reste du département.

Sur la zone urbanisée du parcours de l’ AAPPMA de rares truites sauvages survivent bon an mal an mais la fréquentation des pêcheurs est telle qu’elle finissent presque toujours au fond d’un sac plastique. Par contre sur la partie plus « paumée » du parcours, de belles truites  morvandelles sont bien  présentes.

 

Alors que faire ?

Le linéaire de notre AAPPMA, tributaires compris est d’environ 30 km de rivières. Le parcours aménagé, c’est à dire celui avec un chemin piéton qui le longe, des échelées, des poubelles, des panneaux de renseignement n’est que de  moins de 10 km et encore il s’interrompt sur quelques zones et en réalité ne fait que 6 à 7 kilomètres.

La Gaule Lucenoise possède une centaine d’adhérents carte majeure en moyenne et en mars ce sont plus de 200 pêcheurs de tous horizons qui viennent pêcher sur nos lots.

Allez donc expliquer à ces 80 % de pêcheurs débutants ou occasionnels qu’ils ne prendront quasiment plus aucune truite car l’AAPPMA n’effectuera plus de lâchers !!!!!!

 

C’est la bérézina assurée et l’association  n’aura la saison prochaine plus que 20 adhérents et encore ! Comment dans ce cas assurer la journée découverte pour les enfants qui coute au bas mot 500 euros à l’ AAPPMA, comment motiver des bénévoles pour l’entretien ?

Le pêcheur de base, donc la grande majorité, veut prendre du poisson parce qu’il a payé une carte. Si la pêche était gratuite le problème ne se poserait pas. Mais le pêcheur paye et paye cher, 72 euros pour lancer sa cuiller Mepps Aglia 2 dans la rivière alors il espère offrir quelques bonnes truites à manger à sa famille et ses amis.

Nous les passionnés, les pêcheurs réguliers, ceux qui remettons les poissons à l’eau la plupart du temps ne représentons qu’une infime minorité de tous ces pêcheurs. Sur Lucenay, nous sommes 5 à tout casser, donc 5 pêcheurs devraient commander pour 200 ?

 

La seule solution de bon sens est d’effectuer des lâchers, ceux ci ont trois avantages :

  • Il satisfont le pêcheur qui n’ira pas dépenser ses sous dans les étangs privés et par là même nous permet d’offrir des animations aux enfants.
  • Ils détournent la prédation vers les truites de lâchers plus faciles à attraper,
  • Ils redonnent vie au village et font vivre le commerce local, les pêcheurs se croisent et discutent, l’AAPPMA est « vivante », les bénévoles reviennent et la rivière s’embellit.

Certains pêcheurs raillent l’empoissonnement en truites de bassines mais pêchent sur des parcours privés sans lâchers mais où la pression de pêche est ridicule, d’autres encore hurlent contre les truites arc en ciel qui ne seraient que de la sous truite et j’en connais  encore d’autres qui prennent en parcours privé les truites déversées en amont par une AAPPMA….

 

Si notre AAPPMA peut aussi être amenée à lâcher  des arcs, elle le fera sur une partie du parcours non favorable aux farios car l’eau y courre moins que sur le reste du linéaire, ces arcs mordent bien aux lignes des débutants ou des pêcheurs âgés qui ne peuvent plus crapahuter comme les jeunes. Ces arcs se font toutes prendre en quelques jours et ne vont pas, comme j’ai pu l’entendre, manger les farios ou s’hybrider avec !

Notre AAPPMA a donc un parcours varié, une zone sans aucun lâcher ni aménagement, une zone aménagée où des truites issues de pisciculture sont lâchées et pour terminer une zone en réserve totale de plusieurs kilomètres où toute pêche est interdite.

J’aimerai bien voir le Ternin libre de tout lâcher de surdensitaires, mais c’est de l’utopie complète. La rivière n’est pas qu’à moi et je comprend et adhère à 100 % à la politique de lâchers. Si nous avions une bonne population endémique comme en certains endroits du Jura, je serai opposé aux lâchers !

 

Je précise même, pour les pêcheurs frustrés par leur AAPPMA qui ne fait qu’un lâcher que Lucenay procédera à des lâchers tous les 15 jours  de la façon suivante :

Un premier de 150 kgs pour l’ouverture puis des lâchers bi-mensuels de 50 kg  jusqu’à fin avril, puis un lâcher de 50 kg par mois en mai et juin, voir en juillet selon l’état de la rivière. La pêche c’est aussi attraper et manger son poisson !

Pour les autres, ceux qui restent sur leur certitude d’interdire les lâchers, il reste plein de zones de pêche vierges mais où c’est sportif…

Gardez la pêche.

 

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