Communiqué de presse: Classement piscicole de la retenue de Vouglans

Vers un éventuel passage en 2ème catégorie ?

La question de la catégorie piscicole de la retenue de Vouglans est récurrente
depuis 1986, date à laquelle une liste des grands lacs intérieurs et des lacs de
montagne a été fixée par arrêté ministériel.
Sur ces lacs , une réglementation spéciale pouvant porter dérogation aux prescriptions de certains articles de la loi pêche de 1984 est envisageable. Cette réglementation est déterminée après avis d’une
Commission départementale dont la composition est fixée par arrêté ministériel.
Dès 1986, les services de l’administration font état d’une incohérence entre le classement en 1ère catégorie de la retenue et son peuplement piscicole. Un accord de principe pour un passage en seconde catégorie est initialement trouvé. Le Conseil Supérieur de la Pêche (CSP) souligne même à l’époque qu’« il est réconfortant de constater qu’on envisage enfin de mettre un terme à l’aberration que constituait le classement de la retenue de Vouglans en 1ère catégorie piscicole. »

En 1988, le préfet de l’époque demande un classement de la retenue en 2ème catégorie piscicole,
considérant que le classement en 1ère ne permettait plus d’assurer un aménagement satisfaisant. Alors
que l’ensemble des partenaires s’était montré favorable à ce classement 2 ans plus tôt, notre
Fédération émet un avis défavorable à cette demande, souhaitant obtenir des garanties
réglementaires sur l’absence de toute forme de pêche aux engins sur le lac.
Néanmoins, bien que le secrétaire d’État en charge de l’environnement ait retenu favorablement la
proposition préfectorale, le conseil d’administration du CSP donne en 1989 un avis défavorable à
cette demande considérant qu’il n’était pas cohérent de classer en 2ème catégorie un lac situé sur une
rivière de 1ère catégorie.
Ainsi, la Commission départementale relative à la pêche sur les grands lacs intérieurs et lacs de
montagne du 17 novembre 1989 entérine une réglementation protégeant notamment le brochet via
une période de protection et la mise en place d’une taille légale de capture à 50 cm.
Des incohérences à réglementer la pêche du brochet dans un lac de 1ère catégorie piscicole avaient
déjà été relevées par les services de l’État lors des premières discussions sur le statut piscicole du plan
d’eau en 1986.
L’article R36-36 du Code de l’Environnement précise la liste des articles auxquels le préfet peut porter
dérogation en établissant par arrêté une réglementation spéciale sur les Grands Lacs intérieurs et des
lacs de montagne.
Or, il est stipulé concernant la période d’interdiction de pêche de l’espèce brochet (Article R436-7),
sa taille légale de capture (Article R436-18) et le nombre de captures autorisé par pêcheur et par jour
(Article R436-21) que ces dispositions s’appliquent uniquement dans les eaux de deuxième
catégorie. L’administration envisage désormais la dérogation fixée par la loi dans le seul cadre de la
2ème catégorie, et non pas en 1ère catégorie, ce qui exclut le lac de Vouglans.

Une adaptation de la réglementation de la pêche dans certains plans d’eau de 1ère catégorie, par
application de la réglementation de la pêche en 2ème catégorie, a d’ailleurs fait l’objet d’une demande
de la FNPF lors de la rédaction du décret 2016-417 du 7 avril 2016 modifiant diverses dispositions du
code de l’environnement relatives à la pêche en eau douce. Lors de l’examen du texte par le Conseil
d’État, cette mesure a été jugée non conforme au classement des cours d’eau en deux catégories,
prévu par la loi.
Les discussions concernant le statut du plan d’eau ont donc repris avec les services de l’État en 2016
suite aux demandes des AAPPMA gestionnaires du plan d’eau, lors de la mise en place de réserves de pêche
sur l a retenue , mais également pour la mise en place de mesures de protection pérennes des
espèces emblématiques de carnassiers.
La question de la prise en compte des espèces brochet et sandre dans la réglementation de la pêche
sur cette retenue étant au centre des débats.
L’évolution de la réglementation de la pêche du brochet avec la publication au journal officiel du
décret précédemment cité (dépénalisation de sa remise à l’eau en première catégorie, mise en place
d’un quota journalier, augmentation de la taille légale de capture) a accéléré la réflexion puisqu’il était
initialement question d’harmoniser la réglementation départementale de la pêche des carnassiers en
intégrant la retenue de Vouglans.
Malgré notre volonté, nos demandes n’ont pas été acceptées par l’administration, argumentant
l’impossibilité de transposer la réglementation existante en deuxième catégorie piscicole à cette
retenue.

La DDT du Jura a donc décidé, en mesure transitoire, de geler la réglementation en vigueur ces
dernières années sur ce lac en attendant la tenue d’une réunion de la Commission consultative en
matière de réglementation de la pêche dans les Grands Lacs intérieurs et lacs de montagne. Cette
dernière ne s’étant pas réunie pour débattre du sujet depuis près de 30 ans.
La situation est sans équivoque : le classement en 1ère catégorie piscicole de la retenue de Vouglans
n’a pas été remis en cause depuis 1989 car considéré par les instances de la pêche de loisir dans notre
département comme un rempart à l’installation de pêcheurs professionnels aux engins et aux filets
sur le site.
En effet, l’installation de cette catégorie de pêcheurs sur un plan d’eau de première catégorie du
domaine public fluvial n’est envisageable que si ce dernier est listé dans l’arrêté du 29 janvier 1986
fixant la liste des plans d’eau classés en 1ère catégorie où peuvent pêcher les membres des
associations agréées de pêcheurs professionnels (Annecy, Bourget). Ce qui n’est pas le cas de
Vouglans.
En parallèle, la réglementation de la pêche en vigueur sur le plan d’eau était jusqu’à présent similaire à
celle en vigueur sur les eaux de deuxième catégorie du département (période de protection du
brochet et du sandre, taille légale de capture).
L’aspect dérogatoire de cette réglementation, qui jusqu’alors faisait consensus, est donc remis en cause par
l’administration. Le maintien du plan d’ eau dans s a catégorie piscicole actuelle amènerait cette dernière à
une application stricte de la réglementation de la pêche en 1ère catégorie , à savoir notamment la
remise en cause de la protection du sandre.

En effet, le 2ème décret d’application de la loi biodiversité qui devrait être publié sous peu, permettra
une meilleure gestion de l’espèce brochet dans un contexte de 1ère catégorie : tout brochet capturé
avant l’ouverture de la pêche des carnassiers devra être impérativement remis à l’eau, il sera soumis à
une taille légale de capture (50cm voire 60cm) et à l’application du quota journalier (2 brochets /jour/
pêcheur).
A contrario du brochet, le sandre ne pourrait plus bénéficier de mesures de protection : plus
de période de protection (pêche autorisée dès l’ouverture de la pêche en première catégorie), plus de
taille légale de capture et pas d’application du quota journalier.
Plus globalement, l’introduction de brochet, de sandre et de black-bass resterait interdite en première
catégorie.
Le classement de la retenue en seconde catégorie permettrait de nombreuses avancées en matière de
gestion piscicole et d’halieutisme :

  • Maintien d’une protection concernant l’espèce sandre dont la pêche ouvre dans le Jura en
    2ème catégorie le dernier samedi de mai ;
  • Possibilité de compenser en partie les effets du marnage du plan d’eau, qui oblitèrent la
    productivité piscicole, en rempoissonnant notamment en brochet pour palier à l’absence de
    surface de frai pérennes pour l’espèce ;
  • Possibilité d’ouvrir des secteurs à la pratique de la pêche de la carpe de nuit : la
    demande est très forte depuis de nombreuses années mais interdite en 1ère catégorie ;
  • Application du R436-33 qui précise que pendant la période d’interdiction spécifique de la pêche
    du brochet, la pêche au vif, au poisson mort ou artificiel et aux leurres susceptibles de capturer ce
    poisson de manière non accidentelle est interdite dans les eaux classées en 2e catégorie. Alors
    qu’à l’heure actuelle, dans un contexte de première catégorie, ces techniques sont autorisées dès
    l’ouverture de la pêche le 2ème samedi de mars.

Le classement en grand lac intérieur perdurerait et permettrait éventuellement de profiter du même panel de
dérogations possibles :
réduction de la période d’ouverture de la pêche de certaines espèces , augmentation des TLC,
diminution du quot a journalier …
Pour toutes ces raisons, notre Fédération s’est positionnée en faveur du passage de la
retenue de Vouglans en 2ème catégorie piscicole.
Cette posture s’appuie sur la garantie donnée par les services de l’État, suite aux résultats des
inventaires piscicoles réalisés sur la retenue, que l’exploitation de la ressource par des pêcheurs
professionnels aux engins et aux filets n’est pas envisageable.
Ce modèle de pêche sur un lac de retenue dont l’activité hydroélectrique perturbe autant le cycle
biologique de nombreuses espèces de poissons (exondation de la ponte de certaines espèces,
limitation des surfaces de ponte des espèces phytophiles, limitation de la productivité …) est
inenvisageable. Ce sont d’ailleurs les conclusions d’une note de l’AFB adressée au Préfet du Jura, qui
fait état de la faiblesse de l’abondance de certaines espèces (sandre notamment) au regard des
pressions qui s’exercent sur le milieu.
Nous observons également, à l’heure actuelle et pour ces mêmes raisons, qu’aucun pêcheur aux engins
n’a été autorisé à exploiter la ressource piscicole sur une retenue hydroélectrique en France.
En conclusion, la consultation publique qui se déroulera sous peu permettra à tout un chacun de se
positionner soit pour le maintien de la retenue en 1ère catégorie piscicole, soit en faveur du passage
en 2ème catégorie au regard de ces éléments.

Fédération du Jura pour la pêche et la protection du milieu aquatique, le 12 avril 2019

 

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