Technique simple et accessible au débutant, la truite à la longue coulée est l’ apanage des rivières calmes, de celles dont les méandres se perdent à l’infini et où l’imagination du pêcheur vagabonde en regardant son bouchon.
La longue coulée n’est que l’ évolution de la pêche au coup avec un moulinet. Pour couvrir plus de terrain on ouvre son pick-up et on laisse s’en aller son montage au loin, parcourant ainsi de multiples postes favorables en toute discrétion.
Mon grand-père pêchait à la courte coulée, je ne sais pas si ce terme existe mais il était limité par la longueur de sa canne en bambou de 6 m et il attrapait quelques poissons quand même sans connaître d’autre façon de pêcher que celle apprise de son père. Je l’ai vu marcher le long de la rive, scrutant son bouchon et l’ accompagnant d’un pas qui se calait sur la vitesse de la dérive.
La longue coulée est encore pratiquée de nos jours par quelques pêcheurs peu aventureux mais qui ont trouvé une technique efficace. Ils lancent amont et laissent partir leur bouchon au fil du courant et lorsqu’ils ne le voient plus ils ramènent au moulinet.
Le matériel
La longue coulée pratiquée dans les rivières de mon coin de Morvan se pratique avec une canne téléscopique. L’idéal pour cette technique est la canne bolognaise qui a justement été mise au point pour cela.
Il faut une canne longue pour pêcher canne haute en soustrayant au maximum la bannière au courant et pouvoir ferrer à distance. A cet effet nombre de cannes « truites » classiques conviennent du moment que leur longueur soit supérieure à 3,5 m qui reste un minimum pour pratiquer cette technique.
Le moulinet qui servira sera automatiquement un modèle spinning, celui-là seul est capable de laisser se délover du fil sans freiner le montage. Pour la taille un 1000 ou un 2500 très léger conviendront parfaitement.
Au niveau du corps de ligne il est important d’utiliser un fil flottant, je recommande fortement un nylon car le fluoro est coulant et la tresse aussi. En coulant, ces derniers risquent de ralentir la dérive du montage ou pire de s’accrocher au fond et on connaît la fragilité de la tresse à l’ abrasion.
On pourra graisser une vingtaine de mètre de son nylon avec une graisse qu’on trouve au rayon mouche chez vos détaillants, ainsi le nylon flottera bien. Pas la peine non plus d’utiliser de trop forts diamètres, un 20 centièmes actuels est suffisant pour la grande majorité des biotopes. En cas d’eaux claires ou d’étiage estival, on pourra descendre jusqu’au 16 centièmes. Plus fin ce sera affaire de spécialistes.
Le principe de la longue coulée étant de laisser dériver au loin un appât soutenu par un montage au flotteur, il faudra utiliser un flotteur de bonne portance qui pourra décrocher l’ hameçon du fond seul. Un petit flotteur de faible portance, au moindre accroc de l’ hameçon, coulera et votre ligne sera inopérante. Mieux vaut un flotteur rond, un peu surdimensionné qui aura un effet bouée et qui grâce au courant se décrochera seul dans bon nombre de cas ou ne demandera qu’une légère tirée de la ligne pour l’aider à se décrocher.
Les flotteurs toulousains en sont l’ archétype, oubliez les flotteurs effilés, les flotteurs au coup qui certes plongent à la moindre aspiration mais ne sont pas efficaces dans une eau vive. A la longue coulée ce n’est pas forcément le flotteur qui coule mais surtout qui se déplace différemment de la dérive.
La technique
Le but est donc de laisser une ligne dériver sur un courant porteur à la même vitesse que ce courant. On veillera à régler à une profondeur moyenne car un fond de rivière n’est jamais régulier. l’idéal est que l’appât passe près du fond et avant le flotteur et le reste de la ligne, donc privilégiez une plombée décroissante avec un gros plomb juste sous le flotteur et une série de plus petits en décroissant jusqu’au bas de ligne.
Pas la peine de plomber ultra précis car c’est surtout le déplacement du bouchon qui indiquera la touche et non sa plongée.
Sur un fond d’ 1 m on mettra 90 cm de fond qui feront passer réellement l’appât à 80 cm à cause de la ligne incurvée par le courant. On vérifiera devant soi que l’on n’accroche pas trop avant de laisser filer la ligne jusqu’à ce qu’on ne puisse plus voir le bouchon ou que la ligne s’accroche. On laissera dériver canne haute en ne retenant pas la dérive sauf si on voit que l’on arrive sur une zone moins profonde auquel cas retenir la ligne fera remonter l’appât.
Généralement le pêcheur à la longue coulée débutant lance plein amont, c’est une erreur car il lui sera très difficile de contrôler sa ligne lorsqu’elle se rapprochera de lui. l’idéal est de lancer trois quarts amont face à la rivière et de profiter de la longueur de la canne en la déplaçant latéralement afin d’être toujours prêt à ferrer dans de meilleures conditions.
Une truite est un poisson très rapide et si les poponnes de lâcher continuent de mordre durant quelques secondes après un bouchon peu lesté, les vraies ne se laissent pas avoir longtemps. Au premier déplacement suspect, il faut ferrer !
Profitez des veines de courant pour emmener furtivement votre bouchon sous les frondaisons, dans les coins inaccessibles, c’est une des rares méthodes qui le permet.
Pour plus de discrétion ou pourra pêcher au buldo lesté ou non, c’est le même principe mais il permet de pêcher dans de faibles profondeurs avec un bas de ligne peu ou pas plombé du tout.
Les appâts
La pêche à la longue coulée est une pêche au coup donc on pourra utiliser n’importe quel appât naturel ou qui se mange. Les vers sont excellents mais aussi les insectes terrestres, les baies pour le chevaine.
Comme toujours le ver de terre est le meilleur en eaux un peu teintée mais lors des crues cette technique n’est pas adaptée. Le petit ver de terreau est excellent et dès les beaux jours la larve de porte-bois est un must. La teigne et le vers de farine sont très bons mais on peut essayer d’autres appâts comme les pâtes à truites pour les arcs-en-ciel et même les vairons.
Dès qu’il commence à faire beau, à partir de la mi-avril, une méthode très ancienne fonctionne très bien : le buldo et les mouches. On accrochera une nymphe ou un appât naturel avec une ligne plombée, au-dessus des plombs on place en sauteuse une mouche noyée et au-dessus du buldo en sauteuse une grosse mouche sèche, ce qui permettra de multiplier par trois les chances de piquer un poisson. Pour réaliser les potences, un simple nœud de chirurgien est suffisant.
Lorsqu’il m’arrive de la pratiquer c’est sur les zones un peu calmes et profondes de mes rivières de prédilection. Ces zones ne sont jamais plus longues qu’une centaine de mètres c’est pourquoi j’utilise mon matériel au toc. Je garde le même montage mais je fixe un flotteur Easy Fix de Top Float Innovation. Ce flotteur ne demande pas de démonter la ligne pour être enfilé, il se clipse sur celle-ci et se monte en deux secondes. Idéal même au toc sur certains postes qui demandent à être mieux explorés. La plupart de ces flotteurs sont pré-plombés à leur base, donc rien de plus à faire que les fixer pour en profiter au mieux. On placera juste une petite plombée supplémentaire près de l’ appât pour éviter que celui-ci ne remonte trop dans la couche d’eau.
Pour les grandes rivières profondes et régulières on peut utiliser des flotteurs anglais qui ressemblent à un buldo allongé. Ils sont très discrets et leur pointe peinte en rouge se voit de loin.
La longue coulée permet de prendre tous les poissons de la rivière : Truites mais aussi chevaines, barbeaux, hotus, ombres… C’est une pêche qui prend son temps, qui va à la vitesse de la rivière, une pêche de détente bien plus prenante qu’il n’y paraît pour ceux qui ne l’ont jamais essayé.
Gardez la pêche.
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