Si, comme moi, vous êtes un adepte de la pêche au mort-manié, la question de la conservation des vifs doit sûrement vous faire réagir.
Avoir toujours sous la main de quoi pêcher aux appâts vivants est un luxe rare.
Un des avantages de la pêche au mm est d’être très économique. Une canne adaptée, des montures, quelques vifs dans un petit seau, et c’est parti pour traquer esox et autre lucioperca.
Encore faut-il pouvoir disposer facilement de vifs …
L’article qui suit vous propose de mettre en oeuvre un système simple et bon marché, afin de conserver ses vifs à la maison. En effet, tout le monde n’a pas la chance d’avoir un ruisseau qui traverse son jardin afin de pouvoir y placer en toute sécurité un panier.
Il faudra trouver un endroit pratique pour installer le dispositif. La proximité d’une arrivée d’eau et une alimentation électrique sont indispensables. Il faut en outre penser à l’évacuation de l’eau qui sera renouvelée régulièrement.
On comprend vite qu’il sera plus simple de placer ce bac à vifs au fond du garage ou derrière la véranda d’une maison que dans le salon d’un T1 en plein centre ville … D’autant plus que le système de filtrage est un peu bruyant.
Bien qu’il existe beaucoup d’autres solutions, celle que je vous présente ici a le mérite de donner satisfaction depuis presque 10 ans.
Elle se compose d’un bac d’une capacité suffisante, d’un filtre, et d’une pompe de circulation d’eau. Pour ma part, mon bac est installé sous la dalle de la terrasse, et à l’air libre.
Il s’agit d’un vieux congélateur récupéré, d’une contenance d’environ 150l. Il est rempli à moitié avec de l’eau qui, et j’ai de la chance, provient de la source du village. Cette eau est de bonne qualité, quoiqu’un peu dure,et n’est pas traitée au chlore.
La pompe, elle, est immergée, permettant ainsi son réamorçage après une panne de courant. Un modèle 1200l/h ou 1500l/h est suffisant.
Le filtre est réalisé avec un petit seau, du type seau de plage pour enfant. Ne pas oublier de récupérer le tamis qui se positionne sur le seau.
Le fond de ce récipient sera percé de trous d’un diamètre de 6/8 mm environ, et en nombre suffisant pour permettre la libre circulation de l’eau.
Il sera ensuite garni d’une masse filtrante biologique en céramique, puis d’une ouate de filtration en deux couches.
Viendra ensuite se positionner le tamis, qui servira à briser le jet de la pompe et à assurer un premier filtrage mécanique grossier.
Il ne faudra jamais nettoyer les éléments du filtre à l’eau claire, tout au plus les rincer avec de l’eau du bac. Lorsque la première couche de ouate sera très sale, il suffira de la retirer, et de remettre une nouvelle couche propre (et préalablement bien rincée afin d’éliminer tout résidu de produit chimique) sous la couche restante. Les bactéries vont rapidement coloniser ce nouveau support. Il suffira de recommencer cette opération à chaque fois que la couche supérieure sera saturée de détritus.
Toutes ces fournitures se trouvent facilement en animalerie, pour une somme modique (Les marques citées ci-après sont purement indicatives).
-Pompe de circulation type Blupower 1200 (env. 23,00 euros)
-Un tuyau d’évacuation d’un diamètre adapté à la pompe, et de longueur suffisante.
-Ouate filtrante type Hagen Elite (env. 10,00 Euros les 500 grammes). Un sachet me dure au moins deux ans.
-Masse filtrante céramique type Sera Syporax (env. 17,00 Euros la boite).
Le système de filtre répond à deux fonctions :
D’une part, l’oxygénation de l’eau, grâce au système « chute d’eau ».
Dans une eau stagnante, un film gras se forme en surface, qui bloque le transfert gazeux se produisant au contact de l’air ambiant. L’eau traversant le filtre retombe en pluie dans le bac, brise le film de surface, et permet un très bon échange gazeux.
D’autre part, la filtration mécanique, et surtout biologique.
Et c’est là tout le coeur du système, que vais tenter de vous expliquer. Il s’agit de comprendre ce qui va se passer dans notre bac afin d’en assurer une bonne gestion.
Le cycle azoté.
Je ne vais pas faire ici un cours d’aquariophilie très poussé, vous trouverez sur le web des sites spécialisés très bien documentés si vous souhaitez plus de précisions.
Au départ, les « résidus » engendrés par les poissons (déjections, urine, …) vont très rapidement produire de l’ammoniaque, qui est très toxique.
Cet ammoniaque va ensuite être transformé en nitrites (un peu moins toxique) par des bactéries contenues dans le filtre, puis finalement en nitrates par d’autres bactéries, qui sont également abritées dans le filtre.
Ces nitrates sont peu toxiques pour les poissons. Il faudra simplement veiller à renouveler 25 % d’eau (l’équivalent de deux seaux env.) trois à quatre fois par mois pour contenir le taux de concentration de ces nitrates.
Si l’eau que vous utilisez est très chlorée, il vaudra mieux changer l’eau plus souvent, mais en plus petite quantité. Une astuce simple pour éliminer le chlore de l’eau du robinet est de remplir le bac avec une douchette utilisée à une distance de 10 à 20 cm. La dispersion en fines gouttelettes, qui seront en contact avec l’air, permettra d’éliminer une grande partie du chlore.
Il faut bien comprendre que ce cycle de transformation Ammoniaque/nitrite/nitrate est constant, et qu’une fois en activité, il faut l’entretenir et ne pas trop le perturber.
A la première mise en eau, votre bac sera vide de toute bactérie, et Il va falloir amorcer le processus.
Idéalement, il faudra dans un premier temps introduire 1 à 2 poissons assez résistants (style carassin) dans le bac, et mettre tout le système de filtration/pompe en place. Quelques vairons peuvent également convenir. Changer 20 % d’eau tous les deux à trois jours environ, afin de contenir le taux d’ammoniaque. Au bout de 2 à 3 semaines, le cycle pourra être considéré comme actif.
A partir de ce moment, il ne faudra plus interrompre le fonctionnement du système.
Pour les plus anxieux, vous pouvez effectuer des contrôles de nitrites avec des tests présentés sous forme de bandelettes colorées. Pour ma part, je n’ai jamais jugé nécessaire de le faire. C’est un bac pour conserver quelque temps des vifs, pas un aquarium à plusieurs milliers d’euros.
Votre bac sera opérationnel tant que le cycle sera maintenu en activité, c’est à dire en laissant toujours quelques poissons dans le bassin, qui vont générer les déchets servant de nourriture aux bactéries. En effet, si les bactéries n’ont plus rien à manger, elles vont mourir, et on perdra toute l’efficacité du filtre.
Ne jamais nourrir ses vifs. Cela limitera les déjections au maximum, et allégera le filtrage. De toute façon, si vous allez régulièrement à la pêche, les poissons seront rarement conservés plus de quelques semaines, et ils supporteront très bien cette « disette ».
Faites attention à la différence de température d’eau lors du transfert de poissons. N’hésitez pas à ajouter progressivement de l’eau du bac dans le seau de transport afin d’acclimater les poissons à la température du bac.
De même, ne stockez raisonnablement que la quantité de poissons dont vous aurez besoin pour aller à la pêche.
Le secret d’une bonne introduction de poissons dans le bac : La décantation.
Les poissons que vous allez introduire dans votre bac vont avoir la fâcheuse manie de se vider très rapidement de leurs excréments, et très abondamment en été lorsqu’ils sont en phase de forte alimentation.
Afin de limiter au maximum la pollution de l’eau lors de l’ajout de poissons dans le bac, il va falloir évacuer le plus efficacement possible ces excréments, avant qu’ils ne se décomposent en produisant de l’ammoniaque.
Une solution efficace, et qui est très simple à mettre en œuvre, consiste à mettre les poissons dans un petit panier à vif fermé, lui même positionné dans un seau assez grand. Ce seau ne sera pas fermé par un couvercle, afin que l’eau puisse circuler à l’intérieur. Le tout est immergé dans le bac pour la nuit.
Après une douzaine d’heure, remonter délicatement le seau avec le panier à l’intérieur.
Il suffit alors de jeter l’eau de ce seau, avec toutes les déjections qui se seront accumulées au fond (et il y en a souvent beaucoup …). N’hésitez pas à recommencer le procédé une deuxième fois, surtout en été.
Une fois cette opération effectuée, vous pouvez mettre directement les poissons dans le bac.
Un trop grand nombre de poissons introduis en une fois peut rapidement faire « exploser » le taux d’ammoniaque et de nitrites, le filtre arrivant vite à saturation et ne jouant plus son rôle avec suffisamment d’efficacité. L’eau du bac va rapidement prendre un aspect « laiteux », avec de la mousse en surface, et c’est l’accident : Les poissons vont alors crever les uns après les autres, ces « crevures » générant également beaucoup de déchets organiques, qui vont générer à leur tour de l’ammoniaque, et c’est le cycle sans fin.
Si cela devait arriver, une solution consiste à vider le bac de ses occupants, et de laisser les bactéries faire leur travail de purification. On pourra réintroduire des poissons au bout d’une bonne semaine, lorsque l’eau sera redevenue claire.
On peut également tenter de renouveler une grande quantité d’eau tous les jours pendant une semaine, le temps que le filtre se stabilise à nouveau, mais cela ne fonctionne pas très bien et on se retrouve vite avec beaucoup de dégâts parmi les poissons.
Il faut envisager qu’il y aura toujours dans notre bac un peu de perte due à un poisson blessé ou malade. Lidéal est d’arriver à un ratio de plus de 90 % de taux de survie, c’est à dire un à deux décès sporadiques au maximum pour une vingtaine de poissons. Avec un peu de méthode, il est très facile d’arriver à de bons résultats.
Parmi les vifs qui se conservent le mieux, on trouve les carpeaux et les carassins, mais qui ne me plaisent pas pour le mort-manié.
Les rotengles se maintiennent très bien en bac, suivis de peu par les gardons.
Par contre, les ablettes sont très fragiles, et il est quasiment impossible de les maintenir plus de quelques jours en captivité, particulièrement en été.
La solution proposée ici convient pour conserver toute l’année, dans de bonnes conditions et sans trop de problèmes, une trentaine de vifs mesurant entre 12 et 15 cm.
En hiver, lorsque le métabolisme des poissons est au plus bas, on peut (raisonnablement) augmenter cette quantité, pour peu que l’eau soit très froide, ce qui suppose que le bac ne soit pas situé dans un endroit trop tempéré.
Pour conserver des poissons plus gros, par exemple pour la pêche du silure au vif qui nécessite des appâts d’au moins 600g, il faudra trouver un système mieux adapté.
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