Pêche en barque: Electronique, pour ou contre ?

Un récent commentaire d’un lecteur sur le fait qu’il s’interrogeait que trop de matériel pouvait aller à l’encontre de la philosophie  « cool Raoul » de la pêche m’a amené à entamer une réflexion sur ce qu’est devenue la pêche que je pratique actuellement.

Il est vrai qu’en quelques  années ma façon de voir l’art halieutique a profondément changé, retour sur le passé pas si vieux que ça :

Il y a vingt ans on classait les pêcheurs de carnassiers en deux catégories, les sportifs et les pêcheurs au vif. Désormais et à mon grand regret on classe toujours en deux camps : Les sportifs tendance et les salauds de viandards qui osent encore pêcher au vif. Etant inclassable, car pratiquant les deux avec bonheur et en plus mangeant du poisson (si si ça m’arrive et j’adore ça!!!), je me désole de voir le fossé se creuser entre les tenants de la technologie qui ne pigent pas qu’on puisse être heureux le cul dans l’herbe à regarder un bouchon et les rétrogrades qui hurlent qu’avec nos bateaux et nos sondeurs on chope tout. Pourtant nous sommes tous animés par une seule envie : prendre du poisson et du bon temps.

 

La spécialisation et la « jeunisation » des méthodes modernes a eu quand même un fort mérite, faire rentrer dans le crane que la protection des ressources piscicoles pouvait aller de pair avec une pratique de la pêche des carnassiers.

Avant, et je l’ai fait de nombreuses fois, on  tendait trois cannes à vifs et on pêchait au leurre à coté et tout ce qui faisait maille était emmené. Ça c’était avant pour moi, il y a vingt ans, car se voir être obligé de jeter deux brochets trop longtemps resté au congel m’a vite fait comprendre que ça ne servait à rien d’en ramener plus que nécessaire (2 ou 3 par an). J’ai donc vite pris le pli du montage pour ferrage à la touche et ça me plaisait de reprendre un même bec quelques semaines plus tard sur le même poste en découvrant la cicatrisation des blessures de l’hameçon.

J’ai découvert les moulinets débrayables, les flotteurs anglais……Certes c’est sympa mais ça ne dure qu’un temps, on finit par s’ennuyer ferme au bout d’un moment, qui plus est lorsqu’on est mordu et qu’on va deux fois par semaine à la pêche.

J’ai donc poussé ma spécialisation vers les leurres, essayé, testé, pris du poisson…J’ai adopté la tresse, le fluorocarbone, les agrafes qui changeaient des émerillons JB, puis la tresse huit brins, etc etc…Mais si tout ça m’apportait du plaisir à pêcher, je ne prenais guère plus de poissons et mon truc, celui qui me donnait le panard, c’était bien prendre du poisson.

 

J’ai donc investit dans une barque, puis deux, puis trois. Mon banquier m’aime bien, il adore voir tous ces crédits sur mes lignes de compte. Désormais, j’ai atteint l’âge de raison, ma maison est payée donc je peux consacrer une bonne partie de mon budget à mes loisirs favoris.

Le bateau c’est bien, on va ou on veut mais avec un sondeur c’est mieux et avec un très bon sondeur c’est encore mieux. Avec un gros moteur qui va vite c’est encore encore mieux et on s’éclate puis  pour terminer, avec un Ipilot c’est l’extase. Finalement je ne me suis si bien équipé que pour retrouver une sensation perdue d’extase à la pêche. La même sensation que j’ai eue lorsque je posai mon cul sur l’herbe en regardant mon bouchon.

Certes, dans l’absolu, je pourrais me contenter de pêcher à la ligne, simplement mais je m’ennuierai vite. Ma quête perpétuelle est de me compliquer la vie pour toujours approcher ce moment de pur bonheur lorsqu’on maitrise le grand tout, lorsqu’on fait corps avec lui, lorsqu’on comprend sans chercher à comprendre.

J’avoue des moments de pur bonheur à la pêche lorsqu’un lever de soleil vient donner une couleur incroyable au ciel, lorsqu’un simple casse croûte avec des amis vous transporte de joie, lorsqu’un énorme brochet se fait l’invité au bout de votre ligne…

Mais je peste contre le fait de trimbaler du matériel, avoir chaud, avoir froid, être mouillé, avoir envie d’aller au toilettes, m’apercevoir que j’ai oublié un truc à la maison, me faire déranger par la gentille famille en ballade avec un chien qui se met dans les lignes, par le baigneur  hollandais qui croit que des flotteurs à vifs balisent un couloir de piscine..Et j’en passe.

Tout ceci pour dire que si j’ai un bass boat avec un Ipilot, deux sondeurs, des cannes et des moulinets high tech ce n’est pas pour frimer, je m’en fous de frimer je suis trop vieux pour ces conneries et je n’ai plus rien à prouver aux autres. Je ne recherche que l’excellence comme l’avais précisé mon ami JP Charles, je recherche le meilleur instrument qui va me donner le plus grand panard pour parvenir à la plus belle extase de pêcheur. Et ça j’ai envie de vous le faire partager.

 

L’électronique rentre totalement dans cette philosophie, je suis tout autant en contact avec la nature qu’un vététiste roulant en combinaison fluo sur un VTT en carbone à 10 000 euros avec un GPS visé sur son guidon. Ce n’est pas le fait d’avoir un équipement qui m’indiquera le fond, la présence de poissons, la température de l’eau, la thermocline et le type de fond qui me fera à coup sûr prendre du poisson. D’autres moins bien équipés en prennent plus que moi et ça ne me rends pas jaloux pour autant.

Où va la pêche se diront certains ? Elle va seulement là où nos voulons qu’elle aille et si pour d’autres c’est dormir dans la luzerne en attendant le grelot, s’ancrer pour pêcher au vif sans bouger de la journée pour moi c’est sur le pont avant de ma Troize à traquer esox sans arrêt en mouvement.

 

Ce n’est pas l’équipement qui fait le pêcheur mais le pêcheur qui avec le temps en a de plus en plus l’utilité pour sublimer son art, car c’est un art n’en doutez pas. Essayer de comprendre le comportement d’une bestiole qui a un cerveau gros comme une noisette, le leurrer, le faire mordre, le combattre pour juste le remettre à l’eau après la photo. C’est puéril non ? Mais j’assume totalement cela, j’adore ça et je suis prêt à passer mes week-ends, mon argent, mon temps dans cela. Je ne recherche pas la sérénité mais le combat, pas le calme mais le challenge mais par contre j’aime bien quand il fait beau !!!

Qu’est-ce donc la philosophie de la pêche, la traque incessante d’un poisson qu’on ne voit pas, donc une quête de l’impossible et pas une recherche  de sérénité zen devant la nature.

J’espère que tous vous comprendrez, qu’on peut être fou de pêche, adorer les poissons et leur biologie, connaître les noms des oiseaux, des arbres, des pierres, en gros en connaître un peu sur tout, il n’est pas besoin d’avoir un pantalon africain commerce équitable, une barbe abondante ou des dreadlocks  et un tee shirt « non au nucléaire ». On peut fort bien aimer la nature et allier cette incompréhensible et si personnelle  philosophie de la pêche avec le coté high tech de notre époque.

La pêche a ce grand avantage, c’est que personne n’en détient la vérité, c’est le poisson qui commandera toujours.

Gardez la pêche.

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